AFFAIRE MILA – CONFUSION ET RAISON

Les réactions après les propos tenus par la jeune Mila à l’égard de la religion musulmane démontrent à l’évidence une société en pleine confusion intellectuelle.

Naturellement les menaces de mort à l’encontre de cette jeune fille pour les propos qu’elle a tenus sont inacceptables et intolérables et leurs auteurs doivent être poursuivis devant les tribunaux.

L’on pourrait en rester là des commentaires, mais malheureusement des éditorialistes, intellectuels, politiques, associations de tous ordres se sont, me semble-t-il, pris « les pieds dans le tapis ».

Au regard de la raison, peut-on véritablement, comme cela a été fait, légitimer les propos de cette jeune Mila ? La grossièreté et les injures peuvent-elles être justifiées au seul prix d’un soi-disant droit au blasphème ?

Il est possible, et même nécessaire de notre point de vue, de critiquer les religions de manière rationnelle avec des arguments solides, rappelant la réalité de leur histoire qui fut souvent sanguinaire et liberticide.

Le délit de blasphème a été abrogé par la loi de juillet 1881 sur la presse : le blasphème est donc une notion juridique inexistante.

Il ne s’agit pas là d’un droit au blasphème mais de l’application d’un principe constitutionnel : la liberté d’expression.

La liberté d’expression est totale sauf en cas de diffamation, c’est-à-dire lorsque l’on porte atteinte à l’honneur, la considération, la probité ou la réputation d’une personne ou d’un corps constitué (loi du 29 juillet 1881), ou lorsque l’on provoque à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes, en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race, ou une religion déterminée (loi du 1er juillet 1972) ou encore participer à toute discrimination fondée sur l’appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race, ou une religion, est interdite (loi du 13 juillet 1910).

Par conséquent, contrairement à ce qui est dit, l’appartenance à une religion est protégée par la loi.

La jurisprudence depuis le procès des caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo a cependant limité l’application de ces dispositions législatives aux personnes ou aux groupes de personnes et non pas aux propos tenus de manière générale.

Les paroles de Mila ne peuvent être approuvées dans la forme. Mais c’est son droit : de là à en faire un exemple laisse tout de même un peu pantois.

Sachons raison garder à l’égard des propos de la jeune Mila, ce qui n’empêche pas naturellement de faire le nécessaire pour protéger sa personne des menaces qui lui sont adressées.

Par ailleurs, cette affaire mérite une autre considération inquiétante.

La jeune Mila aurait tenu les mêmes propos à l’égard de la religion catholique ou de la religion juive, les réactions de ses actuels partisans auraient-elles été les mêmes ?

Imaginons les mêmes mots pour le catholicisme ou le judaïsme, qui peut croire un seul instant que les catholiques ou les adeptes de la religion juive seraient restés inertes et au contraire auraient dit « bravo, c’est le droit au blasphème, merci » ?

Soyons objectifs, ceux-là mêmes qui ont défendu corps et âme les propos de Mila se seraient abstenus de tout commentaire ou auraient été extrêmement critiques à son égard.

C’est l’islam qui est à nouveau visée et stigmatisée.

Ce déséquilibre ne peut que pousser tant et tant de musulmans vers plus de radicalisme, plus de salafisme et plus d’islamisme.

Certes, les attentats terroristes islamistes amènent à s’inquiéter, voire à suspecter les musulmans qui vivent en France.

Tous les terroristes sont musulmans, mais est-ce que cela signifie que les musulmans sont tous des terroristes ?

Cet amalgame n’est pas rationnel. Il convient de renouer le lien entre la société et l’islam, et en critiquant de manière ferme celui-ci dans ses rapports avec l’égalité hommes-femmes, l’homosexualité, l’apostasie, la liberté de croire ou de ne pas croire, etc.

Respecter ne veut pas dire tout tolérer, respecter veut dire débattre, convaincre, aider.

La République a désormais un problème avec l’islam.

Et si on pouvait en parler avec calme et sérénité ?

Jean-Michel QUILLARDET

Président de l’Observatoire International de la Laïcité

contre les dérives communautaires

Pour un humanisme universel

Jean-Michel Quillardet a le plaisir de vous faire savoir que son dernier livre est paru aux éditions DERVY le 10 juin dernier : Pour un humanisme universel – Force, sagesse, beauté de la République laïque.

Dans toutes les bonnes librairies ou sur commande (liens ci-dessous).

Bonne lecture !

Résumé :

Pour l’auteur, être franc-maçon au xxie siècle, c’est à la fois s’inscrire dans une histoire, dans un patrimoine intellectuel et, à partir de cette tradition, pouvoir participer au développement d’un projet de société pour ce siècle, un « projet humaniste ». Il souhaite que la franc maçonnerie soit la première force humaniste en France et ailleurs. Dans cette société qui se déshumanise, dans ce monde ou aujourd’hui encore se déroulent sous nos yeux des crimes de masse, le « projet humaniste » s’inscrit dans la modernité. Être un franc-maçon au xxie siècle, c’est être une femme ou un homme engagé quotidiennement dans le combat humaniste. La franc-maçonnerie a un certain nombre de valeurs et de principes qui constituent un avenir pour une société plus juste, plus fraternelle et plus humaine. Et au sein de cette société si disloquée, dans un temple les frères d’origines et d’opinions diverses se réunissent pour tenter de trouver des chemins communs.

Pour un humanisme universel, par Jean-Michel Quillardet. Aux Editions Dervy, chez Amazon, FNAC, Gibert, Cultura ou de préférence dans la librairie la plus proche de votre domicile.

ISBN : 979-1024205274

 

[Hommage] Antoine Sfeir, une grande figure de la laïcité

Antoine Sfeir est décédé, comme la presse s’en est fait largement l’écho, et ses obsèques ont eu lieu à l’église Notre-Dame du Liban le 5 octobre dernier.

Antoine Sfeir, avec Didier Doucet, Fabien Taïeb et moi-même, avons fondé l’Observatoire international de la laïcité contre les dérives communautaires en novembre 2008.

L’idée était de se substituer à l’Observatoire de la laïcité qui avait été créé par décret par le Premier ministre, Dominique de Villepin, mais qui n’avait jamais vu le jour…

La création de l’Observatoire international de la laïcité a donc eu pour effet que le président François Hollande finalement se décide à mettre en application le décret de Villepin et à nommer

les membres de l’Observatoire national, aujourd’hui présidé par Jean-Louis Bianco.

Antoine Sfeir a été un ardent défenseur de la laïcité, une laïcité pure et dure, diraient certains, une laïcité républicaine, forgée au cours de ses expériences négatives du communautarisme libanais qu’il connaissait bien.

Antoine Sfeir un républicain, humaniste et laïque, mais aussi croyant : ses obsèques furent religieuses.

Je tenais à lui rendre hommage ainsi qu’à son courage face à une maladie qui finalement l’a emporté.

Peu de personnalités politiques et médiatiques présentes à ses obsèques et curieusement, alors qu’il était intervenu concernant la défense de la laïcité et de la République de très nombreuses fois dans diverses obédiences maçonniques et associations de défense de la laïcité, celles-ci n’étaient, semble-t-il, pas représentées…

C’est bien dommage.

Antoine Sfeir restera néanmoins une grande figure de la laïcité.

Jean-Michel QUILLARDET

Président de l’Observatoire International de la Laïcité

contre les dérives communautaires

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Silence

Curieusement les propos tenus par le président de la République lors de son récent séjour à Rome sont passés inaperçus.

Or si l’on en croit le Figaro du mercredi 27 juin 2018, devant la communauté ecclésiastique française de Rome, il a dit :

« La laïcité est un mystère, mais ce n’est pas la lutte contre la religion, ce serait un non-sens. La laïcité ne serait pas une pudibonderie contemporaine où l’on dirait « ne parlez pas de religion », « cachez cette religion que je ne saurais voir », car nous avons anthropologiquement, ontologiquement, métaphysiquement, besoin de la religion et ma présence ici témoigne de ce « en même temps » (…) »

Au fond le président Macron reprend en le synthétisant le discours de Nicolas Sarkozy en décembre 2007 en suite de sa consécration comme chanoine du Latran.

Discours désastreux, l’on s’en souvient, où il comparait l’instituteur et le pasteur donnant un rôle plus éminent au pasteur car il n’était pas limité par sa propre connaissance, ayant accès à la foi et à la transcendance…

À l’époque, présidant le Grand Orient de France, nous avions vivement protesté et de nombreux articles de presse s’en sont fait l’écho.

Or Emmanuel Macron dit la même chose et personne ne dit rien !!! ???

Nous ne pouvons que contester cette idée qui consiste à faire croire qu’anthropologiquement, ontologiquement, métaphysiquement, chacun d’entre nous a besoin de la religion…

De nombreux français et françaises ne se reconnaissent dans aucune religion, certains élevés dans ce cadre s’en sont éloignés et n’ont aucun rapport avec la foi ou la transcendance… ils sont agnostiques, athées, matérialistes et ils se reconnaissent surtout dans la philosophie des Lumières qui justement permet par le libre examen, la pensée libre et le rationalisme de n’être enfermé, que ce soit de manière anthropologique ou ontologique, dans aucune identité religieuse.

Emmanuel Macron a également déclaré que la France était bien la fille aînée de l’église et que toute l’histoire du catholicisme était consubstantielle à l’histoire de France : certes, mais il ne faut pas oublier que l’église catholique au nom de la religion chrétienne constituait un système totalitaire qui brimait et brisait les consciences…

Il est regrettable que le président de la République en tant que tel puisse ainsi s’exprimer.

C’est, en effet, une atteinte à la laïcité.

Il n’est pas gênant que le président de la République rencontre le pape et les autorités religieuses de son pays : il doit en effet entretenir des relations avec l’ensemble des corps intermédiaires et des courants de pensée qui font notre nation…

Mais en s’exprimant ainsi, il prend une position personnelle et écarte de la communauté nationale tous ceux qui se reconnaissent d’une toute autre tradition…

Alors oui : pourquoi ce silence des laïques, si prompts à réagir face à un foulard ou l’islam dans son ensemble ?

L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DE LA LAÏCITÉ CONTRE LES DÉRIVES COMMUNAUTAIRES.

Son Président,
Jean-Michel Quillardet

Pour une vraie politique de la laïcité

Force est de constater que la laïcité est de plus en plus souvent remise en cause dans notre pays par une grande partie de la communauté musulmane.

C’est un fait.

Mais nous ne devons pas oublier que le rejet de la laïcité a été également l’apanage des églises et en particulier de l’église catholique pendant de nombreuses années.

Aujourd’hui c’est moins le cas car les catholiques et les chrétiens s’appuient sur le principe de laïcité pour défendre une « catho-laïcité » identitaire fondée sur les racines chrétiennes de la France.

Le contraire de la laïcité, quoi !!!

D’autres encore prônent une laïcité francisée, nationale, voire nationaliste : c’est pour mieux chasser l’émigré, l’arabe, le musulman de France.

Oui il y a bien un racisme anti arabe qui se développe dangereusement.

Et ce n’est pas être « Islamo gauchiste » que de le condamner.

Dans le terme même, d’ailleurs, de « Islamo gauchiste », il y a un son, une musique désagréable.

En mai 68 ce sont bien les « gauchistes » qui étaient violemment attaqués par la droite la plus réactionnaire et conservatrice alors au pouvoir.

Reprendre ce terme en l’accolant à celui d’Islam est un procédé qui relève de l’amalgame et d’une vieille pensée droitière, reprise par un certain nombre de gens de gauche.

La violence du débat quant à la laïcité est réelle  : de part et d’autre c’est le retour du délit d’opinion.

Ceux qui admettent certaines pratiques inégalitaires, notamment entre les hommes et les femmes, homophobes, violentes, agressives, racistes, antisémites, doivent être dénoncés.

Mais peut-on admettre une certaine sincérité des autres, ceux qui considèrent que l’on stigmatise trop une certaine catégorie de la population, se sentant elle-même discriminée ?

C’est aussi une réalité qu’il ne faut pas méconnaître.

Dominique Eddé dans un entretien à Libération critique justement : « ceux qui renvoient les musulmans à l’identité d’un islam intangible et figé. La culture arabo-islamique est plus souvent perçue comme une erreur à réparer qu’une différence à respecter (…)  ».

À l’inverse, soutenir systématiquement le musulman au nom de la repentance du colonialisme, et ignorer la responsabilité des pays arabes à refuser le pluralisme de la pensée et la bienveillance à l’égard de l’autre, n’est pas acceptable.

Mais, est-ce que le fait de scander la laïcité, la proclamer, crier, vitupérer à tout bout de champ, dès qu’un foulard apparaît par exemple, loin d’enraciner la République, en éloigne beaucoup.

C’est pourquoi il nous faut une véritable politique de la laïcité.

Ni laïcité identitaire, ni laïcité ouverte, mais laïcité républicaine.

On dit sans adjectif.

Certes.

Mais pour convaincre, enseigner, expliquer, faire partager, il faut bien utiliser des mots, et adjectifs pour donner du sens au principe.

La politique de la laïcité est d’abord une politique de l’intégration.

Il faut reconnaître le droit à la différence dans le respect des valeurs universelles de dignité, d’égalité et de liberté.

Il faut accepter un multiculturalisme porteur de mixité culturelle et sociale, d’apport mutuel, sans renier aucune culture, aucune tradition, aucune coutume, dès lors qu’elles sont émancipatrices.

Il y a de nombreux français et françaises qui ne sont pas, comme dirait malheureusement Alain Finkielkraut, « de souche (française) »…

Et alors ? C’est un fait incontestable et incontournable.

Il leur est commandé de s’assimiler : c’est-à-dire de renoncer à ce qu’ils sont, à leurs origines, à leurs histoires, à celle de leurs grand-parents…

La République au cours de son histoire n’a jamais obligé quiconque à l’assimilation.

Le seul commandement de la République est celui de l’intégration.

Et pour l’intégration il faut être deux…

L’on constate une véritable haine de certains jeunes dans certains quartiers, dans certaines banlieues et dans certaines villes, à l’égard de la République française…

Pourquoi cette haine ?

Idéologie politique anti-Lumières, anti-humaniste, anti-démocratique, totalitaire, sûrement.

Mais aussi résultat du délaissement d’hommes et de femmes à qui l’on offre aucune perspective, aucun emploi, aucun enseignement, aucune culture…

La politique de la laïcité, c’est également une politique sociale.

La Constitution nous rappelle que la République est laïque. Elle est aussi sociale.

Or, aujourd’hui le constat est amer à cet égard : progression constante des inégalités, accroissement de la précarité, de la pauvreté, difficultés économiques qui touchent les catégories de population les plus à même à croire au miroitement des escrocs de la pensée religieuse.

Il ne peut y avoir de laïcité sans un effort considérable de la nation toute entière à renforcer l’égalité.

Il y a une France qui se porte bien et une France qui se porte mal.

La laïcité ne pose pas de problème à l’égard de ceux qui se portent bien, elle est difficultueuse et débattue pour ceux qui se portent mal…

La politique de la laïcité c’est aussi une politique d’union nationale.

Il convient de rassembler, d’apaiser, pour faire comprendre cette laïcité sans adjectif et ne pas se livrer à des anathèmes d’un camp retranché dans lequel s’enferment tant de défenseurs de la laïcité.

Revenons plutôt aux vrais enjeux : le combat contre le relativisme moral développé par les pays d’origine musulmane, par ailleurs alliés de la France comme le Qatar, ou l’Arabie Saoudite…

Combattre les intégrismes politiques et moraux venant du camp religieux, que ce soit l’intégrisme islamique, l’intégrisme catholique, l’intégrisme judaïque, l’intégrisme évangélique, combattre tous ceux qui refusent la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la démocratie, le respect des droits imprescriptibles de la personne humaine…

Les vrais enjeux de la laïcité c’est rappeler la nécessité de l’universalisme des humanistes et l’enseigner partout où l’on peut.

Donner une image positive du principe laïque.

Et arrêter alors avec cette hystérisation autour de la question du foulard ou du voile (on ne parle pas ici de la burqa ou du niqab).

Elle revient avec la position du nouveau ministre de l’Éducation nationale qui souhaite refuser quant aux accompagnements des sorties scolaires les mères portant un foulard…, ce qui avait été accepté par son prédécesseur au cas par cas.

Il faut naturellement évincer tout prosélytisme religieux quel qu’il soit.

Mais ce n’est pas parce que l’on porte un foulard et qu’on accompagne des enfants à une sortie scolaire, culturelle ou éducative, que le prosélytisme religieux existe.

Après tout il peut très bien y avoir une dame bon chic bon genre qui accompagne des élèves, dame catéchiste par exemple et qui va parler du petit jésus aux enfants : ne portant pas le foulard personne ne le verra.

Quant aux pères qui peuvent également accompagner les sorties scolaires qu’ils soient musulmans ou autre, qui nous dit qu’ils ne font pas de prosélytisme lors de ces sorties ?

C’est le prosélytisme qui doit être éradiqué, ce n’est pas le foulard lui-même…

Sur un autre registre, les prières de rue sont intolérables.

Mais pourquoi lors des prières de rue, devant la mairie de Clichy, qui ont fait tant de bruit, il n’a pas été expliqué qu’il s’agissait en fait d’une protestation à l’égard du maire de Clichy qui avait fermé unilatéralement la salle de prières où se retrouvait une grande part de la communauté musulmane de Clichy.

Il ne s’agissait donc pas contrairement à ce qui a été dit chez un certain nombre de défenseurs de la laïcité de prières de rue, mais en effet d’une manifestation contre l’impossibilité pour les musulmans de prier dans une salle de prières… ce n’est pas la même chose.

Il convient aussi dans le cadre de la défense de la laïcité d’adopter un point de vue, qui semble aujourd’hui bien lointain dans notre société, celui de l’objectivité, c’est-à-dire revenir aux faits.

Et les vraies prières de rue des opposants à l’avortement ?

Qui proteste  ?

Aristide Briand, l’un des principaux auteurs de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des églises et de l’état en avait rappelé le sens profond : l’État est laïque, pas la société.

On doit ainsi s’inquiéter, comme l’aurait fait Aristide Briand, s’il était encore parmi nous, de l’extension du principe laïcité au domaine privé, entreprise privée avec les dispositions permettant la restriction des convictions au sein de l’entreprise, ou sur les plages…

La sécularisation de la société que nous appelons de nos vœux, ne s’imposera pas par la force mais par l’exemple et l’accompagnement…

Alors même, et tous les laïques doivent y réfléchir, que plus nous défendons la laïcité avec force et vigueur, et plus la société la remet en cause.

Le vrai enjeu de la laïcité c’est appeler à la fraternité.

Nous pourrions reprendre la définition de Régis Debray selon laquelle c’est ce qui permet de sortir de la fratrie.

C’est l’émancipation des êtres humains en tant que personne et non pas en tant qu’appartenant à telle ou telle communauté.

La laïcité est un humanisme.

La politique de la laïcité, c’est la pédagogie et l’enseignement afin de redonner confiance en l’amour des autres quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent.

On est insensiblement passé, pour reprendre l’expression de Monsieur Jacques Toubon, défenseur des droits : « d’une politique d’égalité et humanitaire à une politique identitaire et sécuritaire ».

En cette fin d’année 2017, le corps social sur ces questions est à vif, divisé, confus, desséché.

Puisse cette année 2018 retrouver une laïcité sure d’elle-même, épanouissante, lumineuse, solide, avantageuse.

Le député Fréron, le 10 mai 1795, à la tribune de l’assemblée demandait  : « rendons la république aimable (…) ».

Une laïcité centre de l’union.

 

L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DE LA LAÏCITÉ CONTRE LES DÉRIVES COMMUNAUTAIRES.

Son Président,
Jean-Michel Quillardet

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CONFUSION INTELLECTUELLE

La polémique entre la direction de Charlie Hebdo et Edwy Plenel quant à Tariq Ramadan révèle la confusion intellectuelle qui règne dans un certain nombre de milieux.

Nous somme tous évidemment Charlie compte-tenu des attentats meurtriers qui ont été perpétrés au mois de janvier 2015.

 

Mais cela n’empêche pas dans une démocratie comme la nôtre de pouvoir être en désaccord avec des dessins ou des textes paraissant dans cet hebdomadaire.

Aujourd’hui on voit avec un certain sourire que le Figaro Magazine défend la liberté d’expression de Charlie Hebdo, car cela n’était pas le cas il y a plusieurs années quand Charlie Hebdo s’attaquait à l’église catholique !

Incontestablement Charlie Hebdo ne peut faire l’objet d’aucune espèce de censure.

En revanche il peut y avoir débat sur un certain nombre de ses prises de position.

Charlie Hebdo s’est incontestablement au cours des années radicalisé sur la question de la laïcité, rejoignant souvent les rangs de la droite identitaire.

En ce qui concerne Tariq Ramadan, l’on peut de manière parfaitement légitime dénoncer une certaine complicité intellectuelle de Edwy Plenel avec l’idéologue.

Nous n’avons aucune sympathie pour ce personnage dont les déclarations sont en effet très ambiguë et dit-on manipulatoires auprès d’une partie de la jeunesse musulmane.

On se rappelle il y a de nombreuses années le débat entre Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur, et Tariq Ramadan où celui-ci, à une question de Nicolas Sarkozy sur la lapidation des femmes, rétorqua qu’il était favorable à un « moratoire » !!!

Aujourd’hui l’on apprend qu’il serait un prédateur sexuel.

À cet égard il convient de rappeler un principe fondamental de notre droit : la présomption d’innocence.

Certes il y a des dénonciations, il y a des plaintes et l’on doit les prendre en compte mais dans une société démocratique et un État de droit, il ne suffit pas qu’il y ait une victime qui porte plainte pour que la culpabilité de celui ou celle concerné par cette plainte soit établie.

Cela relève de l’enquête judiciaire et à un moment donné de la décision des Juges.

La présomption d’innocence s’est transformée en présomption de culpabilité, mais il faut faire attention, toujours, à ce que l’État de droit soit respecté dans notre pays.

Par ailleurs ce qui est choquant en ce qui concerne l’affaire Charlie Hebdo / Edwy Plenel c’est que Edwy Plenel est mise en cause par Charlie Hebdo et par un certain nombre d’associations de défense de la laïcité sur ses complaisances à l’égard de l’idéologue au moment même où l’on apprend l’existence de plaintes à son encontre pour agression sexuelle et même semble-t-il viol.

C’est commettre un amalgame en soutenant et prétendant que Mediapart connaissait le comportement de Ramadan à l’égard des femmes.

Cette accusation infondée n’est pas acceptable.

Certains utilisent un débat idéologique sur la place de l’Islam en France en instrumentalisant une attitude intolérable, la justice le démontrera, de l’un de ses intellectuels.

Cette querelle n’est pas saine.

Comment par ailleurs ne pas regretter qu’Edwy Plenel ait pu dire que Charlie Hebdo faisait la guerre aux musulmans.

C’est une formule dans le contexte que l’on sait, plus que maladroite et fautive.

De là, comme le fait de manière scandaleuse l’ancien Premier Ministre Valls, à prétendre qu’Edwy Plenel et Mediapart commettent un appel au meurtre…

Et si nous revenions à la raison, aux faits et à la sagesse ?

En d’autres termes et nous y reviendrons, entre la laïcité autoritariste de Manuel Valls et la laïcité molle d’Edwy Plenel, il y a sans doute une troisième voie à laquelle nous travaillons.

L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DE LA LAÏCITÉ CONTRE LES DÉRIVES COMMUNAUTAIRES.

Son Président,
Jean-Michel Quillardet

 

 

 

 

INCOMPRÉHENSION ET TRISTESSE

 

Nous avons approuvé la reconnaissance par le Président de la République, Emmanuel Macron, du multiculturalisme de la société française et nous avons apprécié, lors de sa campagne électorale, sa conception d’une laïcité inclusive, non punitive, rassembleuse, acceptant les différences dans le respect naturellement des grandes valeurs humanistes et républicaines.

C’est la raison pour laquelle nous sommes très étonnés, voire consternés, des déclarations du Président de la République datant du 22 septembre dernier devant la Fédération française protestante, concernant la bioéthique, la fin de vie et la PMA :

« La manière que j’aurai d’aborder ces débats ne sera en rien de dire que le politique a une prééminence sur vous et qu’une loi pourrait trancher ou fermer un débat qui n’est pas mûr (…) ».

Il est donc très clairement signifié que le politique n’a pas à avoir de prééminence sur le religieux !

C’est naturellement le contraire de toute la tradition de la République laïque française, à savoir la séparation claire et nette du spirituel et du temporel, la séparation des églises et de l’État qui implique par conséquent que c’est le politique qui doit faire respecter l’égalité des consciences et donc avoir une prééminence sur les conceptions religieuses et spirituelles de chaque citoyen.

En l’espèce la bioéthique, la fin de vie et la PMA, relèvent en effet de la conscience de chacun, mais il appartient à un État dans le souci d’égalité des conditions devant la vie, la mort et la naissance, de permettre à telle ou telle conscience de pratiquer la fin de vie, ou la PMA pour les femmes célibataires ou vivant en couple.

C’est bien en effet l’égalité entre tous qui doit être la marque du progrès de l’émancipation et l’objectif de la République laïque et sociale.

Il semble qu’il y ait donc aujourd’hui un renversement de cette orientation au plus haut niveau de l’État et nous ne pouvons que le regretter.

À cet égard comment ne pas s’étonner de la position de Charlie Hebdo qui considère que la PMA est une fonction biologique et que non seulement il n’y a aucun droit à l’enfant mais qu’il ne s’agit aucunement d’un problème d’égalité.

Les termes de l’article publié par Charlie Hebdo, et qui a semble-t-il l’assentiment de l’ensemble de la rédaction, est d’une tristesse infinie car il marque une droitisation incontestable de cet organe de presse sur des sujets de société, d’autant que nous avons tous été et sommes tous encore Charlie !

Les heures noires de la pensée reviennent.

Par ailleurs soutenir, comme le fait Monsieur Emmanuel Macron également devant les protestants de France que l’Europe dont « les valeurs humanistes sont irriguées par celles du protestantisme (…) » est singulièrement réducteur.

Et les Lumières, Diderot, Montesquieu, d’Alembert, Lalande, Voltaire…

À nouveau il est privilégié par la présidence de la République, la dimension religieuse par rapport aux philosophies du doute, sceptique, agnostique matérialiste ou athée…

Est-ce le retour de Nicolas Sarkozy ?

L’Europe a certes été irriguée par le christianisme, le catholicisme (pas dans son meilleur aspect), le protestantisme sans doute, mais surtout l’Europe des Lumières, celle du libre examen, de la libre critique, de la pensée libre, sans dogme, sans transcendance.

Le rappeler, c’est d’être ni du vieux ni du nouveau monde, c’est seulement dire les principes fondamentaux de la République française.

L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DE LA LAÏCITÉ CONTRE LES DÉRIVES COMMUNAUTAIRES.

Son Président,
Jean-Michel Quillardet

INQUIÉTUDES

Le 21 avril 2002, tous les républicains de droite et de gauche déclaraient suite à la présence de Jean-Marie Le Pen au deuxième tour des élections présidentielles : « Plus jamais ça (…)  ». Une grande manifestation était organisée de la Bastille à Nation, l’émoi étant considérable en France.

Quinze ans plus tard, Mme Le Pen est présente au deuxième tour et les sondages pour l’élection du Président de la République la mettent d’ores et déjà à près de 40 % ! Personne ne s’en émeut, aucune manifestation, un malaise sans doute, mais c’est tout… L’inquiétude est bien là : cette indifférence, cette banalisation en quelque sorte. Pourquoi ?

Parce que depuis quinze ans, la droite et la gauche gouvernant le pays successivement, ont conduit à cette situation. Banalisation de la parole « frontiste » en matière d’immigration, de sécurité et de laïcité. Par ailleurs, les inégalités économiques, sociales et culturelles se sont accrues. Les pauvres devenant de plus en plus pauvres, les politiques de gauche et de droite précarisant les droits sociaux, les contrats de travail… De nombreux compatriotes se sentent oubliés par la classe politique, « l’establishment  » … comme ils disent. De nombreux électeurs du Front national considèrent qu’il existe deux France, celle d’en haut et celle d’en bas. Ont-ils totalement tort ?

À Paris, ville de privilégiés s’il en est, le Front National est à 5 % : tout est dit. La gauche a cependant une responsabilité particulière : dans le terme parti socialiste il y a socialisme et un socialisme même de gouvernement est une pratique politique, idéologique, historique, qui consiste justement à aider les plus pauvres, à organiser l’ascenseur social, à rétablir une justice fiscale et à garantir plus de droits individuels et collectifs… C’est bien le contraire qui a été fait pendant ces cinq dernières années.

Après cinq ans de Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen au premier tour des élections présidentielles de 2012 était à 16 %, cinq ans après François Hollande, Marine Le Pen est à plus de 21 %, soit plus de 5 points en plus. Cherchez l’erreur… Il est assez cocasse d’entendre des membres du gouvernement de Monsieur Hollande critiquer le candidat du parti socialiste qui est arrivé à un score extrêmement bas… Comme s’ils pouvaient se défausser ainsi de leur propre responsabilité dans l’échec. L’histoire rectifiera les faits.

Le rassemblement républicain face à Mme Le Pen est évident. La candidature d’Emmanuel Macron se situe d’ores et déjà dans un souci de rassemblement. En revanche, Emmanuel Macron ne pourra pas être élu Président de la République avec ses 24% obtenus au premier tour. Il doit a minima engranger en sus 30% des voix. C’est la raison pour laquelle il devra dans sa campagne et dans sa présidence tenir compte aussi des programmes des candidats qui n’ont pas été sélectionnés au deuxième tour des élections présidentielles et se tourner vers la gauche afin de convaincre les électeurs et en particulier les électeurs de Mme Le Pen que le gouvernement de la France va enfin s’occuper des plus pauvres, des plus délaissés, des plus misérables sans adopter les vieilles recettes de l’extrême droite française : la xénophobie, la discrimination, la haine mais en exprimant un humanisme progressiste, réaliste et fécond. C’est le seul moyen pour lui de gagner et de gouverner. Il devra également faire un geste vers la droite républicaine.

En résumé nous ne pouvons échapper à un gouvernement d’union nationale. Il ne s’agit pas ici d’appeler des personnalités diverses et variées de droite ou de gauche mais d’une union nationale des idées et des projets. Les défenseurs de la laïcité républicaine que nous sommes doivent prendre leur part dans cette bataille mais aussi pour soutenir le prochain quinquennat, avec vigilance quant à la nécessité de construction d’une société plus apaisée, respectant les diversités et luttant contre les inégalités.

L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DE LA LAÏCITÉ

CONTRE LES DÉRIVES COMMUNAUTAIRES.

Son Président,

Jean-Michel Quillardet

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APPEL À LA RAISON

La laïcité, en son principe et en son esprit, est une réconciliation des croyants et non croyants, des identités.

La laïcité est le fruit des Lumières et des républicains, combattants pour la déconfessionnalisation de l’État, de l’enseignement public, et de la société…

C’est la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État.

Les cléricaux s’y sont opposés de manière vive et les laïques y ont répondu de la même manière.

Mais la loi de 1905, à juste titre célébrée chaque année, fut une loi de compromis : entre ceux qui voulaient éradiquer le fait religieux et toute expression religieuse de la société et ceux qui considéraient que ladite société ne pouvait se normer que sur les dogmes de l’église catholique.

C’est la laïcité républicaine, d’entente raisonnable, qui a triomphé et qui s’est appliquée pendant de très nombreuses années…

Plusieurs tentatives récentes ont remis en cause le principe de la laïcité.

En 2005, les associations laïques et les obédiences maçonniques manifestèrent dans la rue entre la Bastille et Richelieu-Drouot pour protester contre le rapport Machelon, proposant la remise en cause de l’article 2 de la loi de 1905 et donc la possibilité pour l’État de financer la construction de lieux de cultes…

Ayant eu l’honneur de prendre la parole ensuite de cette manifestation auprès des présidents de la Libre Pensée, Ligue de l’Enseignement et Ligue des Droits de l’Homme, nous avons manifesté fermement une opposition à ce retour du cléricalisme d’État.

En décembre 2008, le président Nicolas Sarkozy prononça son discours du Latran où il exprima qu’une morale laïque était nécessairement asséchée, que le pasteur au sens générique du terme était plus fondamental que l’instituteur puisqu’il n’était pas limité par sa propre connaissance du fait de la transcendance, et que c’était un monde sans Dieu qui avait amené les totalitarismes nazis et soviétiques…

À la tête du Grand Orient de France à l’époque, nous avions vivement protesté auprès du président de la République qui nous recevait le 8 janvier 2008 à l’Élysée.

Aujourd’hui François Fillon, candidat désigné pour les élections présidentielles par la droite et le centre-droite a non-seulement exprimé à plusieurs reprises sa foi chrétienne, mais a surtout dans l’une de ses interventions dit que la transcendance était nécessaire à la vie de l’homme.

Par ailleurs, les intégristes musulmans, au-delà même des terroristes qui sévissent, mettent en cause l’égalité hommes femmes, la reconnaissance de l’homosexualité, l’interdiction de changer de religion, et prônent le retour du délit du blasphème…

Tout cela n’est pas acceptable et il faut combattre les dérives, d’où qu’elles viennent.
La laïcité ne peut être opposée au multiculturalisme, ou plus précisément encore au cosmopolitisme qui est une richesse pour notre pays, cosmopolitisme des idées et des êtres si combattus par les ligues fascistes dans les années 30…

Ce n’est pas, nous l’avons dit à plusieurs reprises, en interdisant, en punissant, en sanctionnant, en excluant, en éliminant, au nom de la laïcité, que l’on incitera à partager et à mieux faire comprendre et accepter le principe de laïcité.

Plus encore, c’est en pratiquant une laïcité autoritaire, voire brutale, que beaucoup de modérés musulmans rejoindront alors les rangs des extrémistes…

C’est la raison pour laquelle la laïcité étant en quelque sorte le centre de l’union, il convient d’arrêter, sur ce sujet, les discours de haine, les débats hargneux…

La laïcité n’est pas un dogme : c’est un principe qui, comme tout principe, peut être discuté, interprété ou appliqué de manière différente selon les circonstances.

Il nous faut penser aussi la laïcité.

Quelle ne fut pas notre consternation lorsque ces derniers jours, un vent de folie a traversé le monde laïque lors des récentes élections primaires cette fois-ci de la gauche…

Des tribunes, ou projets de tribunes, des communiqués, des articles parus dans la presse dénonçant le candidat élu, Benoît Hamon, comme n’étant pas laïque et demandant à tous les laïques de le combattre de manière extrêmement ferme…

Consternation car la laïcité sortait de son rôle en appelant implicitement à voter pour un autre candidat et en calomniant celui qui avait été élu par les participants à ladite primaire de gauche.

Consternation aussi des mots employés, d’une violence inouïe et inacceptable.

En effet, nous avons besoin de tous les républicains qu’il soit de gauche ou de droite pour défendre la vraie laïcité, la laïcité républicaine qui n’est pas la laïcité identitaire de Mme Lepen, la laïcité chrétienne de M. Fillon, ni la laïcité interdite des théocraties islamiques…

Nous sommes de plus en plus las d’un certain nombre de laïques, qui se croient dans un camp retranché, détenteurs de la vérité unique et absolue et qui, la rage aux dents, dénoncent…

Reprenons et sachons garder raison car la laïcité, justement, c’est d’abord et avant tout l’expression de la raison dans un monde de chaos et de tumulte.

L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DE LA LAÏCITÉ CONTRE LES DÉRIVES COMMUNAUTAIRES.

Son Président,
Jean-Michel Quillardet

Sur les dangers de la laïcité identitaire

Interview du président de l’Observatoire international de la laïcité contre les dérives communautaires, parue dans l’édition de Var Matin du 06/12/2016.

Jean-Michel Quillardet y évoque les dangers de la laïcité identitaire : « La laïcité doit inclure et non pas sanctionner ! ».

Pour lire l’interview : Sur les dangers de la laïcité identitaire

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